À l'occasion de la Journée de la vérité et de la réconciliation 2022, nous poursuivons l'appel pour que la santé des Autochtones soit entre les mains des Autochtones.

Plus tôt ce mois-ci, une chronique publiée dans le journal « The Globe and Mail » demandant la tenue d’une enquête publique sur les évènements tragiques survenus en Saskatchewan, expliquait que les effets intergénérationnels des pensionnats indiens, de la négligence et de l’exposition pendant l’enfance à l’éclatement des familles et à la violence conjugale étaient des facteurs ayant contribué à cette tragédie. Les auteurs ont aussi lancé un appel pour que le Canada, ses institutions, ses dirigeants et ses citoyens s’attaquent au colonialisme et à ce qui a été engendré par plus d’un siècle de déshumanisation raciste au fil des ans.

Alors que nous nous arrêtons ensemble pour souligner la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, nous ne devons pas nous créer d’illusions; le refus du Canada d’agir pour la décolonisation, l’inaction des dirigeants et des gouvernements, les démentis et l’effacement de la vérité, ainsi que le manque d’efforts en matière de réconciliation avant la tenue de discours sur le sujet sont tous des facteurs qui nous mènent aux mêmes résultats inacceptables habituels. Le traumatisme intergénérationnel, les familles déchirées, les effets du racisme envers les Autochtones et les obstacles systémiques au bien-être des Autochtones continuent de se faire ressentir cette année, comme dans les années antérieures, et demeurent des problèmes complexes qui ne se résoudront pas d’eux-mêmes.   

Beaucoup d’attention a été accordée à la visite du pape François et aux excuses qu’il a présentées pour le rôle de premier plan de l’église catholique dans la création et le maintien des pensionnats indiens qui ont été des sites de traumatismes et d’actes de génocide; un des résultats de cet effort de relation publique a été de mettre en lumière les besoins de plus en plus importants pour des ressources permettant de venir en aide aux survivants des pratiques canadiennes d’oppression coloniale, et à leurs familles. Et les gouvernements au Canada et les responsables du système de santé vont devoir poser des gestes concrets allant au-delà de l’établissement de lignes d’écoute.

Pour l’Alliance et ses membres, des organisations de soins de santé primaires complets dont des équipes et des centres de santé dirigés par des Autochtones ou des organismes de soins de santé primaires autochtones de la province, la Journée de la vérité et de la réconciliation est l’occasion de parler des mesures requises pour accélérer la décolonisation des systèmes de santé et pour établir des services et des espaces plus sécuritaires pour les personnes et les communautés autochtones, ainsi que des moyens par lesquels nous pouvons changer notre récit collectif afin d’établir les conditions pour la réconciliation.  

En vue de promouvoir les conditions requises pour la santé et le bien-être de toutes les personnes et communautés autochtones, les individus qui travaillent au sein des systèmes de soins de santé et de services sociaux en Ontario doivent avoir une meilleure compréhension de la question et adopter de meilleures pratiques. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons souligner les efforts du Conseil autochtone des soins de santé primaires (Indigenous Primary Health Care Council—IPHCC) visant à améliorer les compétences culturelles et à lutter contre le racisme envers les Autochtones dans les soins de santé et les services sociaux.  

The Anishinaabe Mino’Ayaawin — People in Good Health représente l’approche du Conseil pour la sécurité culturelle autochtone. Le premier cours, Foundations of ICS (les fondements de la sécurité culturelle autochtone) est à l’intention des personnes qui travaillent au sein du système de soins de santé et vise à les sensibiliser à l’importance d’adopter des pratiques respectueuses des valeurs culturelles dans la prestation de soins et services pour les clients et patients autochtones. Le Conseil collabore aussi avec des organisations de soins de santé pour l’élaboration et la mise en œuvre de curriculums, de formations, de séances adaptées, d’ensemble de ressources et d’initiatives locales pour des changements organisationnels. Les membres de l’Alliance appuient collectivement les programmes et les appels à l’action du Conseil. Le moment est venu pour les personnes qui travaillent dans l’ensemble des systèmes de soins de santé et de services sociaux et dans les divers paliers gouvernementaux d’établir le lien entre les gestes concrets pour la promotion de la sécurité culturelle autochtone et le changement du récit sur les traumatismes et le racisme intergénérationnels.  

Pour l’Alliance et ses membres, cette Journée de la vérité et de la réconciliation est le moment de réclamer des mesures additionnelles pour mettre la santé des Autochtones entre les mains des Autochtones. C’est aussi une occasion d’examiner nos organisations et de déterminer ce que nous pouvons faire pour contribuer à des espaces et des services plus sécuritaires, et pour promouvoir l’autodétermination des Autochtones et la gouvernance autochtone en matière de soins de santé. Cela signifie qu’il doit y avoir plus de services de soins de santé dont la planification, la prestation et la gouvernance sont assurées par des organisations et des dirigeants autochtones. Cela signifie qu’il faut offrir des possibilités concrètes et des places aux tables de discussion pour contribuer à la réforme du système pour assurer l’équité en santé. Cela signifie qu’il doit y avoir une restructuration des services et des pratiques au quotidien. Cela signifie que des façons autochtones de savoir et d’être doivent être mises au cœur des systèmes de santé et de bien-être autochtones, et ce par des moyens concrets de travailler ensemble pour l’adoption d’une approche véritable de double regard pour les soins de santé en Ontario. Nous devons tous participer ensemble à ces efforts pour progresser dans ce parcours vers la vérité et la réconciliation.

Une autre façon par laquelle il est possible de s’attaquer aux séquelles du colonialisme sur la santé des Autochtones est l’accès à des guérisseurs traditionnels. Comme l’explique le Centre d’accès aux services de santé pour les Autochtones du Sud-Ouest de l’Ontario sur son site Web, l’accès aux services de guérison traditionnelle est un élément essentiel des soins holistiques et une composante vitale de la guérison des effets continus de la colonisation. Cependant, la reconnaissance du rôle des guérisseurs autochtones traditionnels et leur financement demeurent déficients dans le système de soins de santé de l’Ontario, et l’accès à des guérisseurs demeure difficile ou même impossible pour de nombreuses personnes autochtones pour lesquelles ces services seraient bénéfiques. Lorsque les membres de l’Alliance se sont réunis en juin pour leur AGA, ils ont adopté une résolution demandant au gouvernement provincial et au gouvernement fédéral de reconnaître les guérisseurs autochtones traditionnels comme un important fournisseur de services de santé dans le cadre de la prestation de soins primaires autochtones et d’accorder un financement approprié pour leurs services. Nous répétons cette demande aujourd’hui, car il s’agit d’un moyen concret de s’attaquer aux séquelles du colonialisme et des impacts qui perdurent sur les personnes et les communautés autochtones.   

La lutte contre le colonialisme et ses répercussions violentes sur les personnes, les familles et les communautés autochtones requiert des efforts générationnels par des gens visionnaires qui s’attaquent à des problèmes systémiques complexes avec des solutions novatrices menées par des Autochtones, qui reçoivent du financement adéquat et qui sont appuyées par les gouvernements et les systèmes d’un bout à l’autre du Canada. C’est de cette façon que nous pourrons aller de l’avant ensemble.  

le Vendredi 30 Septembre 2022